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De mes souvenirs, j’en déduis un détail essentiel. Louis était immensément heureux quand il revenait chez lui.

Les longues journées ensoleillées de l’été métamorphosent chaque année la ville de Quillan : les jardinières de géranium colorent ses rues étroites, sur les petites places, les bars disposent des tables pour les touristes, de nombreux spectacles de rue se produisent pendant la nuit, des groupes de cyclistes et de visiteurs se promènent dans cette ville. Les allées et venues des personnes est incessante, malgré la chaleur lourde et le peu d’ombre qu’offre le feuillage des magnifiques platanes.

L’image d’un homme enjoué, très connu par les anciens quillanais, apparait dans mes souvenirs. Il se nomme Louis Cardaillac et c’est mon époux. Je le vois encore pendant que j’écris ces quelques lignes. Les habitants lui parlent toujours des mêmes sujets : du lointain boom économique que vécut la petite ville; de la présence envahissante des retraités étrangers qui ont acheté pour un petit prix de nombreuses propriétés à Quillan ; des changements des coutumes de la ville et du fait que les kiosques vendent à présent des journaux en allemand et en anglais. En guise de taquinerie, Louis dit à ses vieilles connaissances qu’ils devraient apprendre les langues des envahisseurs. À en juger le visage de ses interlocuteurs, ça ne les fait pas rire.

De mes souvenirs, j’en déduis un détail essentiel. Louis était immensément heureux quand il revenait chez lui. Il bougeait dans les rues de Quillan comme un poisson dans l’eau, où il évoquait les moments nostalgiques de son enfance et sa jeunesse. Tout était un prétexte à une anecdote : comme celle sur le monument aux morts de la guerre 14-18 où apparaissait le nom de son grand-père maternel, ou celle de la première phrase qu’il sut lire, étant enfant : le nom de la banque du village.

Malgré cette nostalgie, il ne tentera jamais de rentrer à nouveau dans l’énorme maison où il naquit et où se trouvait autrefois la fameuse épicerie qui appartenait à sa famille. “Regarde comment elle est abandonnée! s’exclama-t-il peiné, ” La cause d’un tel abandon était un contentieux sur un testament qui lui laissa une plaie ouverte qui ne se referma jamais.

Araceli Campos